Caméléonidés
Les Caméléonidés (Chamaeleonidae) sont une famille de sauriens surtout arboricoles, définie par Constantine Samuel Rafinesque en 1815. Elle contient près de 200 espèces de caméléons. Cette famille est divisée en deux sous-familles : les Chamaeleoninae et les Brookesiinae (en).
Ce sont des animaux qui se caractérisent par la mobilité indépendante de leurs yeux, leur langue protractile qui leur permet d'attraper leurs proies à distance, les doigts groupés en deux blocs opposables assurant une bonne prise sur les branches, leur capacité à changer de couleur, et enfin leur queue qui sert à se stabiliser.
Les caméléons sont des reptiles — et des lézards — qui présentent de nombreuses particularités anatomiques et biologiques semblables.
Ce sont des lézards dotés d'une queue assez longue (entre un tiers et la moitié de la longueur totale chez la plupart des espèces). Cette queue peut s'enrouler sur elle-même, et est souvent utilisée pour assurer une meilleure prise dans les arbres.
Ceci n'est vrai que pour les caméléons arboricoles. Les caméléons nains (genres Rhampholeon, Rieppeleon et Brookesia), de mœurs quasi-terrestres, présentent en général une queue bien plus petite et moins mobile.
Les doigts des pattes, griffus, sont rassemblés en deux groupes opposés qui forment une sorte de pince, utilisée pour agripper solidement les branches lors de leurs déplacements. Ils sont dits zygodactyles. Les doigts sont regroupés de sorte que la pince ait deux doigts en vis-à-vis des trois autres. Chez de nombreuses espèces les doigts adjacents sont plus ou moins soudés entre eux.
Les caméléons sont souvent dotés de casques, crêtes et cornes. Ce sont des téguments que l'on retrouve plus ou moins développés chez toutes les espèces.
Certaines espèces comme Trioceros jacksonii ou Trioceros johnstoni présentent de grandes cornes (jusqu'à 3 cm) sur le rostre. D'autres espèces ont une ou deux cornes, plus ou moins longues. Certaines espèces n'en ont pas du tout.
D'autres (Chamaeleo calyptratus par exemple) présentent une crête rigide très proéminente sur le crâne.
D'autres encore ont une crête plus ou moins développée qui court sur le dos ou le ventre, parfois jusque sur la queue.
Quasiment toutes les espèces présentent une structure épaisse sur le dessus du crâne, un peu comme un casque.
Les mâles et femelles sont souvent très différents. Les mâles sont en général plus grands et gros, bien qu'il existe quelques exceptions. De plus, les crêtes, casques ou cornes sont en général moins développés — voire complètement absents — chez les femelles. La robe est généralement très différente ; les mâles ont la plupart du temps des couleurs plus vives et contrastées.
Les caméléons nains (genres Rhampholeon, Rieppeleon et Brookesia) font encore exception. Mâles et femelles ont généralement les mêmes couleurs, et les femelles sont la plupart du temps plus grandes.
Les yeux des caméléons sont proéminents et dotés de mouvements indépendants. Ceci leur permet de surveiller simultanément tous les côtés à l'approche de prédateurs. Lorsqu'ils repèrent une proie, les yeux convergent sur celle-ci pour obtenir une meilleure précision.
Quasiment dépourvus de bâtonnets, les caméléons ont une très mauvaise vue nocturne − et ont un mode de vie diurne.
Pour chasser leurs proies les caméléons utilisent leur langue protractile. Composée entre autres de muscles propulseurs et rétracteurs, la langue est rangée dans la bouche sur l'os hyoïde. L'animal projette avec une grande précision sa langue (dont l'extrémité est couverte d'un mucus gluant) sur ses proies, puis ramène le tout dans sa bouche[1]. La viscosité de son mucus est 400 fois supérieure à celle de la salive humaine[2],[3].
Selon les espèces, la langue peut atteindre presque deux fois la longueur du corps de l'animal. Le caméléon projette sa langue en 1/25e de seconde (à plus de 20 km/h), s'empare d'une proie qui peut atteindre un tiers de sa propre masse, et la ramène à sa bouche en une demi-seconde. La projection puis la rétraction de la langue ainsi que la préhension de la proie associent plusieurs mécanismes physiques d'une certaine complexité[4]. Pour les espèces les plus performantes, l'accélération entre zéro et 97 km/h se fait en un centième de seconde[5].
Le caméléon projette sa langue vers la proie.
Les caméléons sont également connus pour leurs couleurs variées, et surtout la capacité chez certaines espèces de la modifier rapidement. Leur épiderme possède deux couches de nanocristaux qui leur permettent de changer de couleur et de refléter la lumière dans le proche infrarouge.
Le philosophe péripatéticien Théophraste pensait que le phénomène de changement de couleur du caméléon — la métamorphose — provenait de l'air qui remplit son corps : comme ses poumons occupent presque tout son abdomen, l'air prédomine, et faciliterait le changement de couleur[6].
Or, il s'agit principalement d'un mécanisme de communication sociale (les couleurs sombres marquent la colère, l’agressivité, avec des variations des rayures sur les flancs et des signaux visuels changeants qui se concentrent sur la face des combattants ; les mâles utilisent des couleurs claires et variées pour courtiser les femelles)[7], et non d’une technique de camouflage (Alfred Edmund Brehm est le premier à avoir défendu cette thèse au XIXe siècle)[8]. Cependant la plupart des caméléons semblent utiliser le changement de couleur dans les deux buts. Le changement de couleur serait apparu d'abord comme un moyen de communication, le camouflage n’intervenant que secondairement[9],[10]. Le Bradypodion taeniabronchum utilise cette technique de camouflage avec une efficacité remarquable[11].
Les robes des caméléons permettent de les identifier : chacun a un milieu favori. Les caméléons nains, plutôt terrestres, ont en général une robe plutôt marron, alors que les espèces arboricoles arborent souvent du vert, du jaune ou du bleu.
Les caméléons sont des reptiles de taille modérée : les plus petites espèces font près de 3 cm de long (Brookesia nana, découvert en février 2012[12]), et les plus grandes atteignent les 70 cm (Trioceros melleri, Calumma parsonii). Ces tailles s'entendent queue comprise.
Les espèces de cette famille se rencontrent en Afrique, au Moyen-Orient, à Madagascar, en Asie du Sud et dans le sud de l'Europe.
Ces reptiles se rencontrent principalement en Afrique, à l'exception de la plupart des déserts, ainsi que dans les îles alentour : Madagascar, Seychelles, Comores, Canaries, Réunion, nombreuses îles de la Méditerranée. Une espèce se rencontre également dans le sud de l'Europe (Portugal, Italie, Espagne, Péloponnèse) : Chamaeleo chamaeleon. On rencontre également deux espèces dans la péninsule Arabique (Chamaeleo calyptratus, Chamaeleo arabicus), et une dernière espèce (Chamaeleo zeylanicus) en Inde, au Pakistan et au Sri Lanka.
Plus du tiers des espèces de caméléons vivent à Madagascar.
Ils vivent principalement dans des zones forestières ou dans les plaines broussailleuses, humides à très humides, parfois jusqu'à plus de 2 000 m d'altitude.
Selon les espèces la reproduction a lieu une fois par saison ou de multiples fois. Les femelles de nombreuses espèces sont capables de retenir le sperme des mâles durant parfois plus d'un mois et de s'auto-féconder (nombreuses espèces de Chamaeleo, quelques espèces de Furcifer et de Bradypodion). La gestation dure en général d'un à deux mois, mais peut durer près de 6 mois chez certaines espèces (notamment, du genre Calumma).
La majorité des espèces de caméléons sont ovipares. La majorité des femelles creusent le sol pour y pondre leurs œufs, à l'exception des petites espèces (caméléons nains, comme le Rhampholeon) qui les déposent sur le sol. La durée d'incubation est extrêmement variable. Elle va d'une cinquantaine de jours chez les caméléons nains à plus d'une centaine de jours chez la plupart des espèces. Cette durée peut même dépasser une année et approcher deux ans chez quelques espèces (Calumma parsonii en particulier).
Certains caméléons sont ovovivipares. Ce sont généralement des animaux vivant en altitude, où les œufs auraient peu de chance de se développer. Après une gestation assez longue les petits naissent dans des membranes translucides qu'ils percent très peu de temps après. On trouve dans cette catégorie plusieurs Chamaeleo (C. jacksoni, C. werneri, C. rudis, C. ellioti, C. fuelleborni, C. affinis, C. bitaniatus...) ainsi que plusieurs Bradypodion (B. damaranum, B. pumilum, B. setaroi, B. ventrale...).
Certaines espèces sont "intermédiaires". Elles sont techniquement ovipares, mais donnent naissance à des œufs dotés d'une fine membrane, contenant des embryons bien développés et quasi-viables. Ces œufs éclosent au bout d'un mois environ (par exemple Rhampholeon marshalli).
Tous les caméléons sont des carnivores insectivores. Ils attrapent la plupart des insectes qui passent à leur portée. Certaines espèces − en général les plus grandes − consomment également de petits oiseaux et de petits lézards ou geckos.
Les caméléons apprivoisés sont nourris d'insectes tels que les grillons, blattes et cloportes... Les caméléons mangent aussi de la verdure, bien que certaines plantes soient toxiques pour eux (comme le lierre).[réf. nécessaire]
Les caméléons sont peut-être issus des lézards, dont les plus anciens fossiles connus datent du Crétacé. Certains auteurs supposent que le genre Mimeosaurus (en) (Gilmore, 1928) est l'ancêtre direct des caméléons actuels (Romer, 1966). Les fossiles anciens incontestables de caméléons sont assez rares. Le plus vieux connu, Chamaeleo caroliquarti (en), a été découvert en Europe centrale et date de 26 Ma. En 1999 un fossile datant de 99 Ma, doté d'une longue langue et d'un entoglossal (un élément allongé de l'os hyoïde qui sert aux caméléons à projeter leur langue), a été pris pour un caméléon ancestral (ce qui aurait indiqué une origine asiatique des caméléons[13]) ; mais sa description en 2020 a montré qu'il s'agissait en fait d'un amphibien sans lien phylogénétique direct[14],[15].
L'île de Madagascar est souvent considérée comme le berceau des caméléons, de par le fait que c'est là que se trouvent la majorité des espèces existantes ainsi que la plus forte variété de formes. Mais cette idée est actuellement contestée. De nombreux auteurs considèrent que les caméléons viendraient d'Afrique orientale, se basant sur le fait qu'on y trouve de nombreuses formes différentes et de par la présence de fossiles (Hillenius, 1959). Pour appuyer cette thèse des recherches génétiques (Matthey, 1957 ; Matthey & Van Brink, 1960) ont montré que les caméléons présentaient deux types de chromosomes, l'un « continental » et l'autre « insulaire ». Les caméléons de Madagascar et des îles voisines possèdent les deux types, les autres n'ayant que ceux de type continental. Ceci semble indiquer une diversification plus tardive pour les espèces malgaches.
Dans le passé, les caméléons ont eu une aire de répartition bien plus étendue qu'aujourd'hui. On les rencontrait en Afrique mais aussi en Chine (Anquingosaurus brevicephalis Hou, 1976) et en Europe Centrale (Chamaeleo bavaricus Scheich, 1983 et C. caroliquari Moddy & Rocek, 1980). Ils reculèrent vers le sud au Quaternaire, durant la baisse des températures dans l'hémisphère nord, et on ne les rencontre plus qu'au sud de l'Espagne, au Portugal et en Grèce (Chamaeleo chamaeleon) pour la partie européenne. L'Arabie fut peuplée par trois séries de migrations successives, correspondant à des espèces ou sous-espèces distinctes (Chamaeleo arabicus, C. calyptratus et C. chamaeleon orientalis) (Arnold, 1980, Hillenius & Gasperetti, 1984, Necas, 1995).
À l'heure actuelle certaines espèces ont été introduites par l'homme, à la suite de libération d'animaux dans la nature. C'est en particulier le cas de Hawaï (Chamaeleo jacksonii originaire du Kenya), et de quelques colonies en Californie, en Alabama et en Australie. C'est également le cas de Furcifer pardalis introduit à La Réunion où il s'est très bien acclimaté (et où il bénéficie du statut d'espèce protégée).
Selon Reptarium Reptile Database (3 juin 2017)[16] :
Le terme caméléon est issu du latin chamaeleon lui-même issu du grec ancien χαμαιλέων [khamaileon], le terme se décompose en deux racines χαμαί [khamai] qui signifie sur la terre, sur le sol et de λέων [leon] qui signifie lion[17]. Ce terme semble issu de l'Akkadien nēš qaqqari qui signifie littéralement lion du sol.
Le nom scientifique de cette famille, Chamaeleonidae, dérive de la même racine et du nom du genre Chamaeleo avec la terminaison -dae désignant le rang de famille[18].
La classification des caméléons a évolué au cours du temps et continue d'évoluer, d'une part parce qu'on découvre encore de nouvelles espèces et parce que les études (en particulier génétiques) amènent parfois à des redécoupages des espèces et genres existants. La famille elle-même des Chamaeleonidae était autrefois nommée Rhiptoglossa (de Rhipto : jeter et de Glossa : la langue)[19].
Les premières descriptions de caméléons furent l'œuvre de Laurenti en 1768, avec le genre Chamaeleo. Il fut suivi par Khul en 1820 puis Duméril et Bibron en 1834, ces derniers ayant commencé une ébauche de classification.
Ce furent les diverses explorations scientifiques en Afrique et à Madagascar au XIXe siècle et au début du XXe siècle qui permirent de répertorier de nombreux spécimens et d'obtenir une classification plus fournie.
En 1843 Fitzinger définit le genre Bradypodion, en 1865 Gray créa le nouveau genre Brookesia et Günther créa le genre Rhampholeon en 1874.
Ce dernier, avec Boulenger, créa en 1887 la première classification reposant sur des critères morphologiques :
Dans les années 1960 à 1980, Hillenius et Klaver proposèrent une classification plus complexe, où les caméléons du genre Chamaeleo furent séparés selon leur répartition géographique et d'autres critères morphologiques. Ceci fut poursuivi par Klaver et Böhme en 1986 en incluant des données anatomiques plus précises (lobes pulmonaires, os, détails des hémipénis), conduisant à la création de deux sous-familles, les Caméléoninés et les Brookésiinés (faux caméléons).
De l'aveu même de ces zoologistes cette classification possède quelques failles, mais elle reste très utilisée par des chercheurs de terrain. Certains, surtout en Amérique (dont la CITES) continuent à utiliser une classification plus ancienne, ce qui est source de confusion entre les publications.
Plus récemment de nouveaux genres ont été décrits : Kinyongia (Tilbury, Tolley & Branch, 2006), Nadzikambia (Tilbury, Tolley & Branch, 2006) et Rieppeleon (Matthee, Tilbury & Townsend, 2004), sans qu'ils soient encore reconnus largement.
Caméléon de Jackson avec ses cornes.
Caméléon panthère Furcifer pardadis
Dans la mythologie zouloue, le caméléon est présenté comme le messager de l'immortalité. Il est ainsi dit qu'un caméléon nommé Unwabu aurait été envoyé par les Dieux pour apporter l'immortalité aux hommes mais que, prenant tout son temps lors de son voyage, il se fait dépasser par Intulu le lézard qui leur apporte la mortalité à jamais.[réf. nécessaire]
On rencontre de nombreux caméléons en terrariophilie. Ils sont généralement considérés comme délicats voire difficiles à maintenir, et ce pour plusieurs raisons :
Malgré tout certaines espèces sont considérées comme accessibles et se rencontrent en terrariophilie, en particulier Furcifer pardalis et Chamaeleo calyptratus.
La législation qui les concerne est très variable. Certaines espèces ne sont pas ou peu protégées, d'autres sont soumises à CITES, d'autres enfin sont intégralement protégées (Chamaeleo chamaeleon par exemple, en tout cas dans la plupart des pays).
À noter que pour la France la législation impose désormais la possession d'un certificat de capacité pour élever la quasi-totalité des espèces de caméléon. Seules trois espèces n'y sont pas soumises : Furcifer pardalis, Chamaeleo calyptratus et Trioceros jacksonii.
Caméléonidés
Les Caméléonidés (Chamaeleonidae) sont une famille de sauriens surtout arboricoles, définie par Constantine Samuel Rafinesque en 1815. Elle contient près de 200 espèces de caméléons. Cette famille est divisée en deux sous-familles : les Chamaeleoninae et les Brookesiinae (en).
Ce sont des animaux qui se caractérisent par la mobilité indépendante de leurs yeux, leur langue protractile qui leur permet d'attraper leurs proies à distance, les doigts groupés en deux blocs opposables assurant une bonne prise sur les branches, leur capacité à changer de couleur, et enfin leur queue qui sert à se stabiliser.